Médiologie
Fondée par Régis Debray

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La médiologie de A à Z

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Publié le : 1er septembre 2014. Modifié le : 13 août 2020

En cours de publication.

Abécédaire

Ange

Premier nom du messager (en grec, angelos).

Angélologie, première appellation de la médiologie (discipline, fondée circa 550 avant J.-C. par Denys l’Aréopagite). Trois enseignements : 1/L’Éternel ne fait pas ses commissions lui-même, il a un besoin structurel d’agents de transmission. 2/Ces voltigeurs n’opèrent pas en francs-tireurs, ils appartiennent à des milices hiérarchisées sur une échelle d’ordre (la taxis). 3/Tout ange peut devenir démon, tout transmetteur un interrupteur. Le diabolique et l’angélique sont les deux faces d’une même fonction. R.D.

Apprivoiser

Les objets techniques, mais aussi les institutions ne doivent pas seulement remplir leur fonction. Ils doivent être adoptés, « apprivoisés » par le corps, physique et social, et par l’âme des usagers.

Argent

La monnaie est un bien public (notre monnaie), l’argent est un bien privé (mon argent).

Lorsque Serge Gainsbourg brûle devant les caméras un billet de 500 francs, l’émotion que soulève sont geste s’explique par le fait qu’il porte ainsi atteinte non seulement à son argent (ce qui est son droit) mais aussi à notre monnaie (ce qui est répréhensible). La monnaie (voir ce mot) est un bien public, elle est vraie ou fausse ; l’argent est bien ou mal gagné. La plupart des langues, notamment l’anglais (money) confondent les deux termes. Le français, plus rigoureux, n’échappe pas toujours à la confusion : « par ici la monnaie » signifie bien évidemment « par ici l’argent »

Argent ou monnaie ?
Le siège de tous les paradoxes

Autorité

L’autorité n’est pas la puissance, elle ne doit pas sa domination à la force mais à son inscription dans un ordre symbolique.

Celui qui la détient est donc assez différent de la « personnalité autoritaire » (qui échoue généralement à se faire respecter) ; la personne investie d’autorité – le magistrat, le chef militaire, le savant, le prêtre… – tient celle-ci d’une institution qui la dépasse, son autorité lui vient d’ailleurs ou d’un autre. L’ascendant ou le charisme pourvoyeurs d’autorité peuvent se gagner personnellement (le chef a pu le devenir par sa bravoure au combat, le savant ou le professeur ont des « titres » à faire valoir), mais la hiérarchie ainsi instaurée doit, dans tous les cas de figure, quelque chose d’essentiel à la durée écoulée, ou au passé. En bref, l’autorité, qui surplombe d’assez loin la personne présente ou actuelle, percole à travers le temps. Elle a pour ressort la durée. (Daniel Bougnoux).

Bricoleur

Sobriquet flatteur tant pour le médiologue que l’ethnologue (Levi Strauss) et ce à trois titres.

1/ne recule pas devant les petites besognes, ce qui prouve de l’adresse et de l’abnégation. 2/respecte l’adéquation spinoziste de l’entendement et de la chose parce qu’il prend précisément pour objets d’étude des « bricoles » insignifiantes (l’adjonction de voyelles à l’alphabet consonantique, le caractère mobile en plomb, la mise en pâte du bois, la télécommande, etc.) et 3/le bricolage en ce qui le concerne n’est pas seulement in re mais in modo, car la sélection par le milieu technique des variations culturelles favorables opère comme la sélection naturelle elle-même « à la façon d’un bricoleur, sans dessein à long terme » (François Jacob). R.D.

Causalité

Le moulin à vent préféré des Quichotte de l’Esprit.

Quiconque tire au jour les facteurs techniques objectifs d’un phénomène quelconque (social, culturel ou intellectuel) se verra transformé en Sancho Pança (déterminisme primaire, mécanisme grossier etc.) L’univers du médiologue n’est pas de type mécaniste (une cause, un effet) mais systémique (circularité des interactions). L’invention technique n’est pas déterminante mais autorisante. L’étrier n’est pas « cause » de la féodalité, ni la presse à imprimer celle du protestantisme. Mais sans étrier, pas de chevalerie ; sans Gutenberg, pas de Luther. Les théologiens distinguaient la grâce suffisante, qui donne la possibilité de faire le bien, de la grâce efficace, qui procure la réalisation du bien. L’innovation technique relève de la première. (Régis Debray).

Collection

Les idées voyagent mieux en groupes. Sciences, arts et religions sont d’abord des recueils, qui ramassent l’univers physique ou spirituel pour l’organiser et le transmettre. La pérennité d’une parole, d’une œuvre ou d’un axiome est garantie par son appartenance à un mythe, un corpus, un programme. (Louise Merzeau).

Communication

L’un des pôles des disciplines de l’information (et des études médiologiques), l’autre étant la transmission, avec lequel il entretient une relation dialectique (= antagoniste et complémentaire). L’information comme traversée de l’espace peut se distinguer… de l’information comme traversée du temps, étant bien entendu qu’elles ne sont pas aussi séparées dans la réalité. (Régis Debray).

Commutation

Regroupe toutes les opérations permettant de rechercher, d’établir, de maintenir, de modifier, ou d’interrompre des liaisons entre éléments d’un ensemble quelconque.

S’applique d’abord à la reproduction sexuée, provocant une vertigineuse accélération dans l’évolution du vivant. Le calcul, l’hypertexte sont des commutations dans l’espace des nombres ou des mots. L’ordinateur est donc un commutateur. Mais aussi l’aiguillage, l’échangeur routier, les hubs. L’interrupteur électrique, l’annuaire et le central téléphonique, la télécommande sont nos commutateurs quotidiens. Ce sont les médias commutatifs (téléphone, télématique, hypertextes et Web) qui, en s’ajoutant aux médias irradiants (journaux, radio et télévision) modifient le régime actuel de la communication. (Marc Guillaume).

Congélateur*

Après le cheval, le « congélo » est la deuxième plus belle conquête de l’homme. Conjugué avec un four à micro-ondes, c’est un dispositif technique qui l’émancipe de toute intervention féminine.

Face au « frigo », l’homme se trouve mal dans sa peau. Intrus, il ne sait comment le remplir et le ranger ; prédateur, il le dépouille, non sans quelque sentiment de culpabilité chez les plus civilisés. Le congélo, il l’alimente et le pille à son aise, chez lui, sans arrière-pensées sinon la discrète satisfaction d’une maîtrise retrouvée. Le congélo est un ami : on le couve d’un regard attendri, on le « flatte » exactement comme le cavalier flatte l’encolure de son cheval.

- Références : articles « Le micro-ondes et le congélo »

Constructivisme

Cette école de sciences sociales à présent dominante en réaction contre l’objectivisme positiviste d’hier tend à faire de toute réalité une « construction » sociale.

On ira jusqu’à parler d’une « production de l’espace », voire d’une « production du temps ». Du fait que le monde objectif n’est pas séparable des représentations pratiques qu’une société s’en fait, il ne s’ensuit pas qu’une société puisse produire toutes ses références objectives. De ce que la carte contribue à la formation du territoire, il ne se déduit pas qu’un territoire est l’invention des cartographes. Aucun acteur collectif ne produit sa géographie, son climat, ses gisements de matières premières et d’énergie, les lunaisons et les saisons, le soleil et le rythme circadien. Partant du fait avéré des interactions entre groupe social et phénomènes naturels, le constructivisme sociologique, objectivé et durci, en vient à nier l’irréductibilité du naturel au social. Beaucoup plus modestement, le médiologue observe que l’homme n’invente pas ex nihilo son milieu, mais doit inéluctablement négocier avec lui. Et c’est précisément parce que son milieu lui est en dernière instance imposé du dehors, comme un donné irréductible que la domestication technique de l’espace et du temps constitue pour l’humanité une tâche in-finie. (Régis Debray).

Corps

Impossible de définir le corps en tant que tel, toujours pris dans ses relations avec autre chose, l’âme en particulier… Ce qu’on ne peut pas dire, vaut-il mieux alors le montrer ? Ou bien encore se demander à quoi il sert, d’où il vient, comment et par qui il est fabriqué. In vivo ou in vitro ?

Body building
Références médiologiques


Le premier, l’irréductible médium (Régis Debray).

Les technologies de l’Information s’efforcent vers la fluidité, l’allégement, les « immatériaux » (le papier mieux que la tablette d’argile, l’électron des cartes à puces mieux que le papier…). Mais son propre corps, on y revient toujours. C’est lui qui borde nos jouissances, comme il prescrit leur rythme et leur ergonomie à nos chaînes techniques. Au théâtre (C.M. 1) comme à bicyclette (C.M. 5) le corps est au centre de la machine, et ce moteur est à la fête. Dans l’énonciation, c’est lui qui pilote et cadre la plupart des messages à coups d’indices, d’effets de présence et d’aura. Pour réchauffer une représentation en général, il est recommandé d’y injecter un peu de corps (la « ligne chair »). Extravasé et prolongé de mille façons dans les prothèses techniques et médiatiques, le corps reste l’alpha et l’oméga de la plupart des circuits. N’est-il pas au centre du monde propre de chacun ? On le fuit, on le complique, on le sophistique, on l’oublie ­ et c’est encore autour de lui que ça tourne. Avec le développement des technologies de l’information on saura de moins en moins ce que peut, ce que veut, où commence et où finit un corps. (Daniel Bougnoux).

Couvre-chef*

Un couvre-chef peut remplir trois fonctions principales. Pratique, il abrite le crâne des intempéries et autres agressions, y compris celle du regard. Esthétique, c’est un ornement, selon les critères d’une culture ou d’une mode. Identitaire, il signifie qui est le porteur, explicitement ou à son insu. Dans couvre-chef, chef doit être pris au sens propre (la tête, le crâne) et aussi au sens figuré, le chef, le maître, le père, le juge et leurs avatars. Bien qu’à vrai dire, une couronne ne « couvre » pas grand-chose.

- Référence : Le couvre-chef

Dieu

Le seul être dont la parole est « performative ».

Dieu dit « que la lumière soit » et aussitôt la lumière brille, comme si ses mots avaient agi par eux-mêmes. Un enfant facétieux, rentrant du catéchisme, dit : « que la lumière soit », il actionne l’interrupteur et aussitôt la lumière brille, en effet.
Pendant ce temps, le papa du garnement qui préside l’association des boulistes locaux, déclare : « la séance est levée » et tout le monde se lève, illico.
L’homme, à l’image de Dieu, produit avec des mots, des effets spectaculaires dans le monde. Mais la création humaine requiert des #institutions (l’association) et de la #technique (l’interrupteur) : des « médiations », d’où la #médiologie.

Diligence (effet)*

Le nouveau commence par mimer l’ancien. Les premiers wagons de chemin de fer avaient un profil de diligence. Les premiers incunables ont forme de manuscrits ; les premières photos, de tableaux ; les premiers films, de pièces de théâtre ; la première télé, de radio à image, etc. R.D.

Document

« En histoire, tout commence avec le geste de mettre à part, de rassembler, de muer ainsi en »documents" certains objets enlevés à l’usage ordinaire et logés en des lieux propres. » (M. de Certeau).

Dope

Extrait par la langue argotique du verbe « doper, se doper », ce terme désigne certains médiateurs chimiques du bien-être (alors que le dopage est plutôt celui de la performance).

Ces substances présentent deux autres caractéristiques communes : 1) elles produisent des effets secondaires néfastes pour la santé du sujet individuel et social (un mal pour un bien) ; 2) elles sont donc généralement prohibés : leur usage et surtout leur commerce motivent des poursuites pénales. Exceptions notables : l’alcool et le tabac, dont l’usage est néanmoins de plus en plus sévèrement encadré. Sur le plan moral et social, l’usage de la dope, valorisé par la « culture artiste » des élites, voit son aura diluée dans la consommation de masse.
En conséquence, la dope affecte aussi l’imaginaire social et inspire notamment toute une littérature qui fait l’objet de nombreuses adaptations cinématographiques.

Dématérialisation

La « dématérialisation » donne lieu à bien des utopies.

Les nanotechnologies, à défaut de nous libérer de la matière, promettent de transformer sévèrement notre rapport pratique avec elle. Notre modèle industriel se voit remis en cause par des applications qu’inspire l’analogie entre le traitement informatique des bits et celui des atomes.

Fabulous Labs


La dématérialisation désigne l’allégement et la mobilité croissante des supports d’inscription et la rupture des contacts physiques autrefois liés à l’échange. D’où le mythe de la totale dématérialisation des échanges de biens et de signes. Généralement les idéalistes sont guéris de cette croyance par leur première panne de disque dur. (d’après François-Bernard Huyghe).

Education

Effet bougie

Toute nouvelle technologie fait payer un gain utilitaire d’un appauvrissement des jouissances attachées à l’usage de la technologie précédente qu’elle remplace. Ainsi de l’éclairage électrique remplaçant la flamme de la bougie : l’usage d’une technologie « dépassée » nous fait prendre conscience de cette perte et tente de la compenser.

L’ « effet bougie » est particulièrement éclairant, c’est le cas de le dire.
La flamme de la bougie produit une « ambiance » : mélange paradoxal d’intimité (elle rapproche les gens autour du « foyer ») et de mystère, quand elle anime les ombres de manière inquiétante ; expérience esthétique : des œuvres, des visages, des objets, semblent plus beaux, plus expressifs, tandis que l’éclairage électrique les écrase.
La chandelle éclaire « mal » mais « mieux ».

Environnement

Enlevez brutalement à quelqu’un ses vêtements, sa maison et tous les objets qu’elle contient et vous produirez probablement chez lui des troubles de l’identité.

S’il décide de s’en séparer volontairement, c’est différent, car il a pris le temps de retirer progressivement ses investissements psychiques des objets qui l’entourent). L’être humain sait que son existence physique est inséparable de son environnement naturel. Il lui reste à prendre conscience que son existence psychique est inséparable de son environnement d’objets, autrement dit de son « technosystème ». (Serge Tisseron).

Frontière*

L’essence même de la frontière est de réunir de manière indissociable la séparation et le passage.

C’est un « concept dialectique », si l’on veut : amputée de l’un de ses termes, elle dégénère. Une frontière que l’on ne passe pas s’appelle un mur… Or, depuis la chute du mur de Berlin et l’abolition de tant de frontières, des murs s’érigent un peu partout – mais même un mur peut regagner un peu de la dignité attachée à la frontière lorsqu’il est percé d’une porte que l’on peut ouvrir ou fermer.

Lire l’article « Frontières »

Gouvernance

« Le mot anglais governance a été remis à l’honneur dans les années 1990 par des économistes et politologues anglo-saxons et par certaines institutions internationales (ONU, Banque mondiale et FMI, notamment), de nouveau pour désigner « l’art ou la manière de gouverner », mais avec deux préoccupations supplémentaires ; d’une part, bien marquer la distinction avec le gouvernement en tant qu’institution ; d’autre part, sous un vocable peu usité et donc peu connoté, promouvoir un nouveau mode de gestion des affaires publiques fondé sur la participation de la société civile à tous les niveaux (national, mais aussi local, régional et international) » (Etymologie du terme « gouvernance », europa.eu).

Référence : article « Gouvernance »

Graphosphère

Age de l’écrit

Période de l’esprit humain ouverte par l’imprimerie et déséquilibrée par l’audiovisuel (¼ 1470-1970). Fait passer du rationnel au scientifique, de la vérité au vérifiable. Médiasphère propice aux mythologies du progrès et aux messianismes séculiers. Début de l’accélération du temps historique et première contraction industrielle de l’espace, sous l’effet de la vapeur et ensuite de l’électricité. R.D.

Hypersphère

Ère de l’Internet ou du « numérique ». Le numérique permet de simuler et de combiner (hybridation) les médias caractéristiques des médiasphères précédentes (presse, radio, télévision).

Information

Jogging (effet)

Nom plaisant d’un phénomène capital et paradoxal, l’effet rétrograde du progrès matériel.

La déchéance des membres inférieurs était jadis pronostiquée chez les bipèdes motorisés. Or, moins les citadins marchent, plus ils courent. Au lieu de l’atrophie annoncée, la remusculation. La déstabilisation technologique suscite une restabilisation culturelle. A chaque ’bond en avant’ dans l’outillage, correspond un ’bond en arrière’ dans les mentalités. D’où notre formule : ’la post-modernité sera archaïque ou ne sera pas’. Et le caractère en général infondé tant des alarmes que des promesses ’futuristes’. R.D. Lire la suite.

Logistique

La logistique est l’art d’acheminer et agencer des éléments dispersés en vue de produire un tout organisé.

Rien de plus médiologique que l’histoire de la logistique. Elle s’applique en effet d’abord aux choses de l’esprit avant de rejoindre les corps et l’empirie, dont elle tend à nouveau à s’affranchir vers la fin du XXe siècle. En vain : les idées même ne sauraient voyager sans conteneurs.

Voir l’article de Médium 10 (Un concept)

Logosphère

État de civilisation suivant l’invention de l’écriture, dans lequel l’écrit, au statut encore subordonné, sert d’abord à transcrire une oralité primordiale aux dictions encore sacralisées. En Grèce, assure le passage du mythos au logos, ou du récit légendaire au discours rationnel. Naissance, avec l’alphabet vocalique, de l’universel.

Machine

Ce qui distinguera toujours le fonctionnement de l’homme et celui des machines, même les plus intelligentes, c’est l’ivresse de fonctionner, le plaisir.

Inventer des machines qui aient du plaisir, voilà qui est heureusement encore au delà des pouvoirs de l’homme. Toutes sortes de prothèses peuvent aider à son plaisir, mais il ne peut en inventer qui jouiraient à sa place. Alors qu’il en invente qui travaillent, »pensent« ou se déplacent mieux que lui ou à sa place, il n’y a pas de prothèse, technique ou médiatique, du plaisir de l’homme, du plaisir d’être homme. Il faudrait pour cela que les machines aient une idée de l’homme, qu’elles puissent inventer l’homme, mais pour elles il est déjà trop tard, c’est lui qui les a inventées. C’est pourquoi l’homme peut excéder ce qu’il est , alors que les machines n’excéderont jamais ce qu’elles sont."
(Jean Baudrillard, Le Xerox et l’infini).

Monnaie

Médias

En cours de publication.

Médiasphère

Milieu technique déterminant un certain rapport à l’espace (transport) et au temps (transmission).

Concept générique se spécifiant historiquement en logosphère, graphosphère, vidéosphère, etc. Chaque médiasphère s’équilibre autour d’un médium dominant (la voix, l’imprimé, l’image-son), foyer de fonctions aux compétences décisives, et de ce fait au sommet des hiérarchies sociales. La médiasphère est à une population de communicants ce que la biosphère est aux peuplements d’animaux et de végétaux. Elle abrite une multitude de micro-milieux de transmission, comme la biosphère une multitude de biotopes, chacun doté d’un certain état d’équilibre dynamique ­ mais, à chaque époque, sous l’hégémonie d’un mégamédium plus performant que les précédents. R.D.

Médiologie

La médiologie s’efforce de comprendre comment la communication et la transmission du sens sont affectées par les technologies de l’information et les institutions qui les mettent en œuvre.

Mémoire

Pour le médiologue, la mémoire n’est pas le produit d’une faculté neurologique, mais celui d’une compétence médiologique, au croisement du politique (traditions, commémorations, institutions) et de la technique (systèmes d’inscription, archives et aide-mémoire). Ressort et finalité de toute transmission, la mémoire est aussi au cœur de la « révolution » nous umérique, dont l’enjeu majeur n’est plus celui de la communication mais bien de l’agrégation de nos traces. C’est du reste l’outillage mnémotechnique qui permet d’identifier des médiasphères, c’est-à-dire des milieux de transmission émanant d’un même système d’organisation des traces. Rien d’étonnant alors, si le temps lui-même, et l’histoire, sont à ce point façonnés par nos modes d’enregistrement (inscription, mise en ordre, sélection, anticipation) des traces, et la manière dont nous y accédons.

Nous

Ce pronom personnel de la 1re personne du pluriel peut s’employer comme substantif masculin singulier (le nous) pour désigner « la communauté de deux ou plusieurs êtres humains ayant des relations interpersonnelles et des intérêts communs. » (CNRT

L). Vaste programme. Voir, entre autres, Médium 20-21.

Rythme*

Le rythme nous fait marcher, défiler, danser...

Médium universel et total, le rythme présente trois caractéristiques essentielles : - totalité : il affecte à la fois le corps, l’esprit et l’âme ; - propagation : il s’empare du sujet qu’il transforme en métronome ; - synthèse : s’il ne communique rien d’autre qu’un mouvement, il s’hybride parfaitement avec le sens pour produire un médium de synthèse (paroles et musique) redoutablement efficace.

Le médium rythme

Secret

Le secret, c’est le médium !

Si le secret est une information à diffusion restreinte, il requiert un « sceau », un « strictement confidentiel » pour informer qu’il y a là-dessous une information qui vaut la peine prise pour l’occulter (ou la dévoiler, c’est tout comme). En d’autres termes : le secret, c’est le médium. La preuve ? On peut faire des pieds et des mains pour se procurer une enveloppe portant la mention « Confidentiel Défense » alors même qu’elle est vide. Référence : « Secrets à l’ère numérique ».

Technique

Peut être qualifié de technique, en général, toute compétence, performance ou invention qui ne s’inscrivent pas dans le programme génétique de l’espèce.

La rhétorique est une technique (l’apprentissage des procédés donnant à la parole une efficacité maximale sur un auditoire donné), mais la parole en elle-même n’est pas une technique car, sauf anomalie, tout être humain dûment socialisé a une compétence innée pour apprendre à parler, non pour écrire. La preuve : il existe dans l’histoire des sociétés sans écriture, mais on n’en connaît pas de muettes. L’écriture est donc une technique. C’est dire qu’un système technique – en l’occurrence, de notation graphique – n’est ni héréditaire ni inné. L’alphabet vocalique relève de l’accident heureux. Le fait technique est placé sous le signe de la contingence. R.D.

Technologie

Anglicisme souvent emphatique, superlatif savant de technique, passé dans le langage courant. Devrait seulement, en fait, s’appliquer à l’étude systématique des objets et évolutions techniques (Beckmann, 1777), discipline illustrée en France par Leroi-Gourhan, Haudricourt, Bertrand Gille, Simondon, etc. R.D.

Temps

Trace

La trace n’est pas seulement ce qui reste d’une croyance, d’un savoir ou d’une opinion, mais l’une des conditions nécessaires à leur émergence et leur propagation. Car tout système symbolique est en lui-même un système de traces, anticipant sa transmission par l’adoption ou la production d’un régime d’inscription spécifique.

La trace suppose un support, un outil, une technique d’écriture et de lecture, un régime sémiotique, une méthode d’indexation, de contrôle et de conservation et un dispositif de diffusion. Religions, idéologies et doctrines s’articulent donc autour d’une certaine économie des traces, qui ordonne leurs modes d’enregistrement, de stockage et de circulation. Point de convergence entre des savoir-faire, des cultures, des acteurs et des technologies, la trace témoigne d’une organisation du collectif par l’organisation de la matière. On s’intéressera donc autant à la cohésion des systèmes de traces, qu’à leur évolution : soit des chaînages, comme celui qui relie la trace imprimée au savoir critique et encyclopédique, en passant par le papier, le plomb, la presse, l’édition, l’école, la bibliothèque, la composition, la classification… ; soit des tendances, comme la miniaturisation, l’accélération, la multiplication, l’automatisation ou la virtualisation des traces.

Vidéosphère

Définition vidéosphère

Succède à la graphosphère. Période de l’esprit humain ouverte par l’électron, relayé et amplifié par le bit. Culture de flux (électronique) ou du fragment (numérique), le support axial glisse de la page à l’écran. Retour en force de la ligne Chair. Intégration des ethnies dans un ensemble techno-planétaire (l’ubiquité – instantanéité), avec désintégration récessive des totalités héritées de la graphosphère (effet-jogging) – empires territoriaux, États-nations, classes, Partis, Églises, etc. R.D. …ça se discute (voir l’article ’Ceci ne tuera pas cela’ dans les Cahiers de médiologie n°6). L.M.

Zapper

La télécommande est-elle l’outil-symptôme d’un individualisme exacerbé, ou l’accès du téléspectateur au pouvoir éditorial et le premier degré d’une naissante interactivité ?

Le petit écran encourage une attention picoreuse et velléitaire. Le tactile s’y mêle au visuel, on ne contemple pas l’image, on la tient au bout de ses doigts ; on pianote à la recherche (utopique) d’un programme plein, sans temps morts ni « tunnels ».

Ton monde n’est pas le mien, dit le zappeur, tu m’embêtes ! (…) Démocratique par excellence, ce geste privilégie l’échantillon, le micro et la forme clip, soit le triomphe d’une certaine télé : celle qui ne développe rien, et parle à peine, qui préfère le massage au message, qui affirme « sans transition » le choc visuel et le rythme, le pur brassage d’étincelles.
La menace du zapping pèse à l’écran sur chaque énonciateur, qui doit prévenir l’ennui du téléspectateur moyen en autozappant son discours ou ses images. (Daniel Bougnoux).

éducation

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