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Robert Damien : contributions à Médium

Robert Damien (1949-2017)

par La Rédaction

Publié le : 7 avril 2018. Modifié le : 4 août 2024

Entre 2004 et 2016, Robert Damien a publié une vingtaine d’articles dans la revue Médium. En voici la liste.

M52-53. Nouveaux pouvoirs, nouvelles servitudes (juillet-décembre 2017)

La Subversion bouffonne (extraits de son livre, Éloge de l’autorité, Armand Colin, « Le Temps des idées », 2014).

M48. Matières à penser : pour François Dagognet (juillet-septembre 2016)
Sous la direction de Robert Dumas en collaboration avec Robert Damien.

Souvenirs d’un disciple.

Un disciple de Dagognet témoigne ici, affectueusement, de sa relation avec ce maître paradoxal dont il n’a pas retenu seulement les enseignements mais aussi sa manière très particulière de les délivrer. Un mandarin iconoclaste ?

M46-47. Eros Aujourd’hui (janvier-juin 2016)

Sous la direction de Pierre-Marc de Biasi.

Ève pornocrate

Avec sa verve lucide, Proudhon préfigure le coït de la chair et du marché au cœur du nouveau capitalisme.

M43. Charlie et les autres (avril-juin 2015)

Radiographie d’un moment fraternité

La réquisition.

Vous êtes « Charlie » ? Oui. Et les autres ? Aussi. L’un et l’autre donc ? Oui, nous le devenons ici et maintenant. Nous revendiquons de pouvoir être plusieurs, bleu, blanc, rouge, sans être des frères ennemis. Nous sommes tous ensemble les auteurs signataires de cette augmentation sacrée : la République française. Une Patrie commune (à défaut de Père unique et total dont certains ont la nostalgie) pour un Peuple assemblé dont la voix (vox populi, vox dei) commande des obligations mutuelles et des sacrifices partagés vis-à-vis d’un tout supérieur dont chaque membre devient frère de cet improbable Charlie.

M41. Rythmes (octobre-décembre 2014)

Sous la direction de Louise Merzeau et Régis Debray

Rock’n’roll ou 2’35" de bonheur

Bloc contre bloc et tout est figé. Corps contre corps et tout est libéré… Contre le menuet amidonné des quadriges, l’Europe autrichienne et allemande imposa la valse à trois temps, tournante et à couple fermé. Des aristocrates viennois de la grande valse straussienne à la musette canaille du bal populaire, la valse est d’enlacement, elle enserre dans l’étreinte tournoyante d’un couple envoûté par l’élégance de ses figures. Malgré la résistance tardive du tango argentin et de ses excès langoureux et amers, la valse signa la victoire européenne dans l’usage public des corps. Des salons aux guinguettes, son rythme maître des futilités fut la matrice d’une eutopie corporelle : « une valse rapide jette dans les jeunes cœurs, une ivresse qui éclipse la timidité, augmente la conscience des forces et leur donne enfin, l’audace d’aimer » écrira Stendhal dans De l’amour (1822).

M37-38. Secrets à l’ère numérique (octobre 2013-mars 2014)

Coordinateur : François-Bernard Huyghe

Sécrétions

Le corps dénudé ne dit pas toute la vérité, loin de là. Que dissimulent encore ces apparences dévoilées, cet épiderme ? On n’ose y penser… Ici, pourtant, on ose le dire. L’homme est un animal sécrétant. Il mue, il sue, il pue. Humer la tanière où chacun baigne dans son jus révèle que les dieux pénates du foyer sont volubiles. Ils s’expriment et donnent les clés d’une identité accessible. Ils rendent perceptible à tous les sens l’essence singulière de notre corps, tombereau bien plus que tombeau. Esprit, où es-tu ? Dans le corps qui souffle et s’évente, suinte et transpire, excrète et urine. D’où chacun naît et renaît dans l’intolérable promiscuité des ordures et des jouissances. Le secret nous spécifie dans notre genre de vie : il se trouve au bout de nos sécrétions. Elles nous font reconnaître et délivrent nécessairement le message crypté de notre intimité. Ces extimités fâcheuses nous signent malgré les blindages qui protègent les aveux organiques de notre privauté. Le secret est dans les sécrétions comme la lettre volée sous nos yeux : en évidence.

M36. L’esprit des lieux (juillet-septembre 2013)

Le cérémonial du vestiaire.

Le vestiaire n’est pas un lieu trivial. C’est une enceinte rigoureusement architecturée où l’organisation du nous requiert de chacun qu’il se dépouille avant de prendre l’habit, qu’il se concentre et s’équipe en vue de se livrer, en forme et fraternellement, au bonheur du combat. Le sport de rugby se joue en public. Il nous fait éprouver cette joie d’apparaître et de se montrer sans être obscène ni monstrueux. Chaque joueur acquiert, dans son rôle où il naît à soi-même, une existence révélée par ses souffrances, entre souffle et soufre, livrées aux jugements. Son autorité n’a de légitimité que par l’épreuve publique de ses exercices, elle se prouve et se fait approuver. C’est toujours un spectacle, avec une certaine théâtralité, comme sur une scène séparée des spectateurs installés sur des gradins mais qui attendent d’admirer ou de condamner ce dont chacun est capable.

M27. (avril-juin 2011)

« Un ancêtre ». Claudel, médiologue de la ville ?

Certes, d’autres poètes du XIXe et du XXe siècle pourraient être privilégiés car ils ont célébré la modernité urbaine, industrielle et technique, du Rimbaud des Illuminations jusqu’à Zone d’Apollinaire en passant par Baudelaire ou Aragon et bien d’autres. Tous, selon des registres différents et à des titres divers, développent une exaltation lyrique et invocatoire de la nouvelle puissance humaine qu’incarne la ville comme nouvel ordre social libéré des tutelles naturalistes et religieuses. Elle est le siège d’une métamorphose politique qui transforme la ville en cité et l’homme urbain en citoyen. Le poète ne peut que saluer cette euphorie.

M24-25. Frontières (juillet-septembre 2010)

Portes et fenêtres : pour un discours de la méthode afin de bien conduire sa maison.
L’homme est un être maisonnable. Il n’est vraiment devenu humain que doté de maison et ne le reste que de demeurer. Il est de multiples formes de maisons, et on en peut changer, et c’est cette transformation dont l’histoire fait la narration. La bibliothèque nous en livre les récits par lesquels l’humanité raconte combien multiples sont les maisons qui l’ont changée. Montaigne réclamait un « chez soi où être à soi », un domicile fixe, un dedans bien dissimulé, fermé au regard, étanche et impénétrable. Nous en avons tous la nostalgie, l’espoir vain de faire retour à l’âge utérin du cocon maternel. Portes closes et fenêtres fermées d’une bénéfique opacité pour ainsi pouvoir cultiver une inviolable subjectivité, bien recluse dans ses murs, ses rideaux (de fer), ses huisseries infranchissables.

M22. (janvier-mars 2010)

Un objet. Balles et ballons, modeste contribution à une ludographie culturelle.

On juge un être à sa position dans les alternatives majeures : êtes-vous bain ou douche, rasoir ou barbe, slip ou caleçon, baskets ou souliers, chien ou chat, maison ou immeuble, vélo ou mobylette, voitures ou transports en commun, etc. ? Il en est de même avec un autre dilemme névralgique : êtes-vous un enfant de la balle ou du ballon ? De quel côté penchez-vous et quand vous tombez, à quoi vous raccrochez-vous ? Les pieds et les mains, la tête et les épaules, en tapant dans les murs comme on le fait avec une balle ou en sautant par la fenêtre en vous prenant pour un ballon volant, une balle dans la tête du suicidé ou le ballon explosif du martyr ?

M20-21. Nous (juillet-décembre 2009)

L’équipe.
Nous parlons d’esprit scientifique, d’esprit des lois, des peuples, d’esprit de corps et même d’Esprit Saint pour qualifier ce qui inspire une totalité agissante, qui dépasse quelquefois ce qu’on en attendait. De même que l’esprit vient aux jeunes filles, l’esprit vient à l’équipe. Par quels voies et moyens ? Ça vient, ça va venir, allez, allons-y, « ça ira, ça ira », comme dit la chanson sans qu’on sache vraiment d’où cela vient ni où cela va. Esprit de corps, es-tu là ? Rien n’est moins sûr car souvent il s’étiole, il est épuisé avant même de naître. Chacun se sent à la fois miteux et calamiteux dans ce groupe désagrégé où rien ne semble gouverné, où il n’y a ni gouvernail ni gouvernement, tout part à vau-l’eau. On se sent alors le corps lourd, empoté, avec la conscience aiguë de ses insuffisances, on se met à s’écouter, on a mal de partout, on se plaint, on récrimine, on ne pense qu’à soi, ses petits malheurs, ses petits bobos. On a l’impression douloureuse que tout « fout le camp », part au néant, que chaque initiative est vouée à l’échec, tombe dans le vide…

M19. (avril-juin 2009)

Un objet. Éloge du rasoir. Introduction à une petite métaphysique de la barbe.
N’en déplaise à la légende noire de la nouvelle orthodoxie, il y a des utopistes heureux. King Camp Gillette (1855-1932) est de ceux-là : il a changé la face de l’homme. Comment ? Par la mise au point en 1897, après de nombreux tâtonnements de bricoleur, d’un outil utile, facilement manipulable par tous : un rasoir mécanique pour la barbe, de modèle réduit et à prix modique, muni de lames interchangeables à double tranchant enserrées dans une tête démontable. Ce petit appareil bien pris en main autorisait le moindre des hommes à se raser confortablement lui-même la barbe en toute sécurité, chez lui et partout où le travail comme le loisir l’amenaient à se déplacer.

M16-17. L’Argent maître (juillet-décembre 2008)

« Bonjour l’ancêtre ». Proudhon, un révolutionnaire à la Bourse.
Qui se souvient que le socialiste français est l’auteur d’un Manuel du spéculateur (1853) ? Son propos : non pas détruire mais ‚ républicaniser la Bourse. L’économie sociale comme le micro-crédit contemporain ont sans doute une dette envers le Franc-Comtois qui créa, dès 1849, une banque mutualiste du peuple.

M15 (avril-juin 2008)

« Bonjour l’ancêtre ». Jean Le Clerc, ou la République des bibliothèques, avec Robert Damien.
Jean Le Clerc, né à Genève en 1657 et mort à Amsterdam en 1736, est considéré comme un polygraphe subalterne, un vulgarisateur abondant et un critique oublié. Son effacement est aujourd’hui quasi total. De cette œuvre monumentale, retenons sommairement trois nœuds stratégiques. Tout d’abord, Le Clerc fut le traducteur, l’éditeur et l’ami de Locke. Le militantisme lockien de Le Clerc lui fit publier la méthode bibliographique de classement des livres de la bibliothèque de Locke (qui contenait 33 titres de Le Clerc) et un Éloge de feu monsieur Locke…

M12. Qu’est-ce qu’un chef ? (juillet-septembre 2007)

Mégalomanie et mélancolie.
Relationnelle toujours, l’autorité est relatée par celui à qui elle en impose. La satire rappelle à l’éminence qu’elle n’est que relative à cet autre même dont elle se fait l’écho narquois, parfois rancunier. Elle rétablit le rapport à l’autre de toute autorité en parasitant les illusions de grandeur. En changeant les points de vue et les échelles du regard, elle restitue les termes de comparaison. Dans la mégalomanie, folie des grandeurs, se creusent alors les plis amers de l’idéal. Déçu de découvrir sa dépendance vis-à-vis d’autrui, le chef sombre dans la mélancolie, maladie d’Héraclès, maladie de la grandeur.

M11. (avril-juin 2007)

« Bonjour l’ancêtre ». Les Idéologues ou le démon des Lumières (1789-1830).

Les Idéologues ? Des « démons » promis au bûcher, disait Joseph de Maistre, qui s’y connaissait en la matière. Ces rationalistes radicaux font plutôt figure de dinosaures. Ils furent rationalistes comme on n’ose plus l’être, comme on ne peut plus l’être. Ils prétendaient fonder la certitude du bonheur sur la vérité du savoir. Ils récusaient ainsi toute validité aux sentiments toujours trompeurs, et ils déniaient toute influence positive aux émotions toujours furieuses et néfastes de l’opinion.

M10. Les nouvelles hybrides (janvier-mars 2007)

« Bonjour l’ancêtre ». François de Neufchâteau, la craie et l’ardoise.
Né en 1750. Mort en 1828. Procureur général à Saint-Domingue, député à la Législative, dont il fut président, il est incarcéré sous la Terreur, mais Thermidor le libère. Ministre de l’Intérieur sous le Directoire, président du Sénat, il fut créé comte de l’Empire. Poète et fabuliste, il est aussi agronome, membre des sociétés d’agriculture, dont il promeut le développement. Spécialiste des tableaux statistiques comme outil de gouvernement, il est l’organisateur de la première exposition publique des produits de l’industrie, ancêtre des futures expositions universelles.

M9. (octobre-décembre 2006)

« Symptômes ». Basket, survet, market ou Homo basketicus, Homo democraticus ?
L’humanité commence par les pieds, nous dit l’anthropologue. Regardons-les pour reconnaître ce qui nous commande. Pour comprendre les devenirs de l’humanité, le sérieux de la pensée nous propose une métaphysique du visage, du port de tête et de ses supervisions hautaines. C’est là se mettre à la hauteur des noblesses opportunes qui nous mènent à bon port et en revendiquer l’arrogance. Ne prétendons pas à cette éminence. Osons privilégier les pieds sinistres et baisser nos
regards.

M7. (avril-juin 2006)

« Bonjour l’ancêtre ». Gabriel Naudé, l’inconnu de la Mazarine (1600-1653).
Guère fréquentable et peu fréquenté, cet homme de peu, sans rang ni sang, cumule les handicaps : bibliothécaire obscur, libertin érudit, fidèle de Mazarin, défenseur scandaleux de la raison d’État. À quels titres inscrire ce soutier besogneux dans notre arbre généalogique ?

M1. (automne 2004)

Bonjour l’ancêtre. Proudhon et les chemins de fer.
Au contraire de la sociologie, et comme l’attestent les numéros des Cahiers de Médiologie sur la route, Anciennes nations, nouveaux réseaux, la bicyclette, l’automobile, la médiologie a toujours accordé la plus grande importance aux moyens de transport. La notion de médiasphère, par exemple, ou milieu de transmission culturelle historiquement déterminé, inclut les systèmes de transport physique en vigueur. La domestication du temps ne peut ignorer celle de l’espace. Sur cette voie, un prédécesseur…



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